Chronikin

Portrait du Colonisé d'Albert Memmi

Je ne saurais trop recommander la lecture de ce livre devenu un classique qui analyse de manière plutôt efficace les méfaits du colonialisme.

A travers deux portraits parallèles, celui du colonisateur précédant celui du colonisé, Albert Memmi analyse les conséquences d'une ignominie dont les conséquences sont encore et toujours d'actualité....

...Les oppresseurs produisent et  maintiennent de force les maux qui rendent, à leurs yeux, l'opprimé de plus en plus semblable à ce qu'il faudrait qu'il fût pour mériter son sort...(Extrait de la préface de J-P Sartre, p25).

Tout comme la bourgeoisie propose une image du prolétaire, l'existence du colonisateur appelle et impose une image du colonisé. Alibis sans lesquels la conduite du colonisateur, et celle du bourgeois, leurs existence mêmes, sembleraient scandaleuses.(...)

Soit, dans ce portrait-accusation, le trait de paresse. Il semble recueillir l'unanimité des colonisateurs, du Libéria au Laos, en passant par le Maghreb. Il est aisé de voir à quel point cette caractérisation est commode. Elle occupe une bonne place dans la dialectique: ennoblissement du colonisateur-abaissement du colonisé. En outre, elle est économiquement fructueuse.

Rien ne pourrait mieux légitimer le privilège du colonisateur que son travail; rien ne pourrait mieux justifier le dénuement du colonisé que son oisiveté. Le portrait mythique du colonisé comprendra donc une incroyable paresse. Celui du colonisateur, le goût vertueux de l'action.(Page 99)

Aujourd'hui, les lettrés africains  occidentalisés ont repris le flambeau. C'est généralement avec le même mépris que le colonisateur qu'ils traitent leurs compatriotes, les accusant de tous les maux et surtout du plus grand de tous:la paresse!

MN Mpembi